Plus de 120 organisations appellent à ne pas ratifier l’accord global UE-Mexique
Selon le média POLITICO, l’UE et le Mexique seraient proches de se mettre d’accord sur les modalités de finalisation et de ratification de l’accord de libre-échange entre l’UE et le Mexique. Dans une lettre ouverte adressée aux dirigeants politiques du Mexique et de l’Union européenne (UE), plus de 120 organisations de la société civile mexicaine et européenne, dont plus d’une vingtaine françaises, appellent à ne pas ratifier cet accord. Négocié dans l’opacité la plus totale, cet accord, qui a été conclu en avril 2020, en pleine pandémie, va approfondir la libéralisation du commerce, ouvrir de nouveaux marché et donner de nouveaux droits aux entreprises multinationales, à rebours de ce qui serait nécessaire pour faire face aux crises sanitaires, sociales, économiques et écologiques que nous connaissons. Le processus de ratification pourrait débuter d’ici à la fin de l’année.
Ce nouvel accord, négocié dans la plus grande opacité pendant quatre ans, s’il devait être ratifié, remplacerait l’accord EU-Mexique actuellement en vigueur depuis l’an 2000. Loin d’en régler les aspects problématiques, ce nouvel accord approfondit la libéralisation du commerce, ouvre de nouveaux marchés et donne de nouveaux droits aux entreprises multinationales. Il lèverait les barrières tarifaires (droits de douanes…) pour 99% des produits échangés entre l’UE et le Mexique. Les exportations de riz (+998%), de viande (+848%), de sucre (+450%) du Mexique vers l’UE pourraient exploser, tandis que celles de l’UE vers le Mexique, comme pour les produits laitiers (+462%) le bœuf (+660%) et le sucre (1245%) pourraient en faire autant. L’accord comprend un quota de 20 000 tonnes supplémentaires de bœuf qui pourraient être importées en Europe du Mexique.
Cet accord lèverait également de nombreuses barrières commerciales non tarifaires et ouvrirait les marchés publics des collectivités territoriales mexicaines aux multinationales européennes. Selon la Commission européenne, c’est la première fois que le Mexique accorde aux entreprises étrangères l’accès aux marchés publics nationaux, territoriaux et locaux. Cela pourrait avoir des conséquences désastreuses au Mexique : privatisation des services publics et de la gestion, perte d’emplois, etc. Cet accord UE-Mexique est également le premier accord avec un État latino-américain à disposer d’un chapitre sur l’investissement qui accorde aux entreprises européennes le droit exclusif de poursuivre l’État mexicain devant un tribunal d’arbitrage investisseur-État (RDIE – ISDS en anglais).
En cours de traduction, cet accord pourrait prochainement entamer son processus de ratification, en commençant par le Conseil de l’UE et le Parlement européen, et de leurs équivalents mexicains. Les parlements nationaux des États membres de l’UE devront également approuver le nouvel accord, a minima le chapitre portant sur l’investissement. La Commission européenne souhaite court-circuiter cette ratification nationale, qui allonge énormément le processus (le CETA, accord UE-Canada n’est toujours pas pleinement ratifié), en « divisant » l’accord en deux pour que la partie commerce ne soit ratifiée qu’au niveau européen, et pas au niveau national. Jusqu’ici, le Mexique avait refusé que l’accord soit divisé en deux et c’est notamment à ce sujet que les négociations se poursuivent.
Autant de raisons qui justifient que plus de 120 organisations de la société civile mexicaine et européenne, dont plus d’une vingtaine françaises, parmi lesquelles l’Aitec, Alternatiba, les Amis de la Terre, Action non-violente COP 21, Bloom, le CCFD-terre solidaire, le collectif Stop CETA-Mercosur, la Confédération paysanne, le CRID, France Amerique Latine, France Nature Environnement, la FSU, Générations Futures, la Ligue des droits de l’Homme, publient une lettre ouverte qui appelle les dirigeants politique du Mexique et de l’UE et de ses États-membres, dont la France, à ne pas ratifier l’accord de libre-échange « modernisé » entre l’UE et le Mexique.